Publié le 26 mai 2020

Confinement : l’économie de plateforme, grande gagnante de la pandémie ?

En imposant à nombre de commerces de fermer durant le confinement, le Covid-19 a fait évoluer les modes de consommation à grande vitesse. Au bénéfice des plateformes ou du commerce local ?

 

175 000. C’est le nombre de nouveaux postes ouverts par Amazon dans ses entrepôts du monde entier depuis le début du confinement. Pendant ce temps-là, aux États-Unis, des dizaines de commerces et d’entreprises étaient obligées de licencier par millions… Poussant les salariés et entrepreneurs à postuler chez le géant américain. Mais cette situation inédite fait-elle pour autant des plateformes web les grandes gagnantes de la crise du Covid-19 ?

 

Une situation contrastée

Pour l’économiste Daniel Cohen, la crise va accélérer le développement d’une nouvelle forme de capitalisme, le capitalisme numérique. Son moteur ? Les plateformes comme Amazon, Uber, Deliveroo ou encore Airbnb qui, par leur capacité à mettre en relation vendeurs et acheteurs en s’appuyant notamment sur les données, deviennent les nouveaux orchestrateurs du marché. Pour autant, toutes ne tirent pas leur épingle du jeu dans cette crise. Si Amazon a vu son trafic bondir, la situation est beaucoup plus difficile pour d’autres entreprises comme Airbnb et Uber, qui dépendent directement de nos déplacements et de nos vies sociales.

 

Vers de nouvelles habitudes de consommation

De plus en plus de Français déclarent acheter sur Amazon (ObSoCo), et ses parts de marché du e-commerce s’élevaient à 22% en 2019 (Kantar). Avec la crise, on peut anticiper que les habitudes des consommateurs vont changer durablement. Livraison à domicile, commande à toute heure, interfaces personnalisées grâce aux données… Les arguments en faveur du e-commerce sont durables. Et la crise du Covid-19 a poussé les commerçants à s’adapter à marche forcée.

 

Une dépendance toujours plus grande des commerçants aux plateformes

Pour trouver de nouveaux débouchés, les commerçants se tournent bien souvent vers les plateformes. Elles commercialisent à la fois leurs propres produits et ceux de tiers qui ont de plus en plus besoin d’être présentés sur ces sites et qui sont en concurrence avec les produits Amazon, d’autant plus en période de confinement. Une étude de 2016 l’affirme : pour ces grandes plateformes, l’objectif n’est pas d’être n°1 sur le marché, mais de devenir le marché. Là où tous les échanges se produisent. Une dépendance qui peut s’avérer risquée pour un commerce dont la majorité des ventes est réalisée sur une plateforme. Toute décision de cette dernière, comme par exemple celle de vendre uniquement des produits de première nécessité pendant le confinement, a un impact direct sur les finances de milliers de commerçants.

 

Les initiatives locales ont la côte

Mais qui dit crise, dit créativité. Ces dernières semaines ont vu apparaître plusieurs plateformes de vente en ligne en direct des producteurs, notamment pour ce qui est produits alimentaires. L’agence de l’alimentation Nouvelle-Aquitaine a ainsi réuni plus de 1 800 producteurs et 40 000 consommateurs en quelques semaines sur sa plateforme solidaire de vente de produits locaux. Et les initiatives de ce type pullulent en France, même dans les métropoles. De là à parler de revanche des petits commerçants et du local ? Cela dépendra surtout des consommateurs, d’après l’économiste Philippe Moati. Des visions du monde cohabitent mais il est encore trop tôt pour statuer définitivement sur nos modes de consommation post-confinement.